Dans une Argentine en crise, un projet innovant offre des cryptomonnaies en échange de scan de l’iris, attirant des centaines de milliers de personnes. Mené par Worldcoin, l’initiative soulève cependant des questions sur l’utilisation des données biométriques recueillies.
Un salaire en cryptomonnaie pour survivre à la crise
La politique d’austérité de Javier Milei et la récession économique qui sévit en Argentine poussent la population à des solutions radicales. Parmi elles, le scan biométrique de l’iris en échange de cryptomonnaie, proposé par Worldcoin, le nouveau projet de Sam Altman, patron d’OpenAI. Selon Nahuel, 23 ans, livreur à Buenos Aires, le processus est simple et rapide. « Ils te scannent, ça ne fait pas mal, une fois ton compte validé, tu reçois trois jetons Worldcoin tous les treize jours », explique-t-il. Ces jetons, équivalents à environ 30 euros, peuvent être convertis en pesos argentins via une application nommée Binance.
Des questions autour de l’utilisation des données biométriques
Toutefois, Nahuel comme beaucoup d’autres participants, est moins au fait de ce qui est fait des données biométriques ainsi récoltées. « Ils ne l’expliquent pas, et je ne l’ai pas demandé », avoue-t-il, tout en admettant être conscient des risques potentiels. « Je sais que ce n’est pas bien, mais avec la situation économique du pays, c’est impossible de s’en sortir. Si j’allais mieux économiquement et que j’avais un travail stable, je ne l’aurais jamais fait », confie-t-il.
Nécessité et défiance : l’équation délicate des Argentins
Avec une inflation annuelle atteignant les 288%, beaucoup d’Argentins font face à des difficultés pour boucler leurs fins de mois. Francisca, 76 ans, autre participante au projet de Worldcoin, se montre résignée : « Je vais demander à quelqu’un qui s’y connait mieux en technologie, car moi, je n’y comprends rien ! ». Elle reste toutefois méfiante quant à l’utilisation possible de ses données biométriques, faisant allusion à une série télévisée où ces informations servent à contrôler la population.
Une initiative controversée à l’échelle internationale
Outre l’Argentine, où un million de personnes ont déjà participé à l’initiative de Worldcoin, l’entreprise attire l’attention à l’international. En Espagne et au Portugal, ses activités ont été suspendues pour enquête. Par ailleurs, les États-Unis, pays d’origine de ses créateurs, n’ont pas autorisé la collecte de données biométriques.
Worldcoin promeut son projet en prétendant viser l’établissement d’un revenu universel et en revendiquant la transparence, ayant rendu son programme accessible en open source. Cependant, face à l’opacité entourant l’utilisation des données biométriques et les suspensions d’activités en Europe, la légitimité de la démarche est mise en question.
L’innovation technologique peut-elle se faire au détriment de l’intégrité numérique des citoyens ? Face à l’urgence économique, jusqu’où sommes-nous prêts à aller pour un peu d’argent supplémentaire ?